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Paris, photo, humeurs, un peu de HTML/CSS pour faire sérieux. Feinte innocence et vraie naïveté (ou vice-versa). Encore un blog qui agite ses petits bras en couinant "Viens me lire !"

Saint-Séverin [2]

Le quartier de Saint-Séverin est resté  dans son jus , dans sa disposition du Moyen Âge. De ce fait l'église, prise entre boutiques et restaurants, y perd en mise en scène pour le touriste : pas de parvis, de place monumentale ni de noble perspective, juste un peu d'air devant la façade. Elle y gagne en simplicité de manières :  je joue pas au monument, je bosse, moi, Môssieu ! , pense-t-elle peut-être  mais on peut toujours causer, approchez donc.  Alors on cause, elle et moi, comme je cause avec les bâtiments qui ont des choses à dire : en tournant autour et en levant le nez.

Gargouilles (église Saint-Séverin, Paris V)

Son clocher fut la plus haute tour de Paris lors de sa construction, au XIIIe siècle, pourtant l'église, vue de la rue, ne semble pas très élevée – c'est vrai et faux tout ensemble, on en reparlera. En tout cas, même avec peu de recul, on distingue bien des détails.  C'est à vous, cette collection de gargouilles ?  Celles-ci ornent le mur sud de l'église, avec un peu de chance la lumière est flatteuse, comme ici – un peu de chance… et un petit coup de correction d'exposition.

Ce côté sud, l'arbre en témoigne, donne sur un carré d'herbe assez inattendu, bordé sur deux côtés de belles et sobres galeries ogivales.

Charnier (église Saint-Séverin, Paris V)

Un cloître ? On pourrait le penser mais non. Le petit oratoire du VIe siècle, consacré à Saint Martin, l'ermitage de Séverin le solitaire, se tenait déjà dans un coin reculé, abandonné, d'une ville qui allait se limiter à l'île de la Cité pour quelques siècles. Plus tard, lorsque la météo internationale serait plus calme et qu'on aurait digéré la peur de l'an mil, on reviendrait vivre dans ce quartier, y construire une belle et bonne église romane comme il y en eut tant. Mais dans l'intervalle ?

Dans l'intervalle se trouvait ici un cimetière : les fondations de l'église reposent sur un des plus anciens cimetières parisiens. Tous ces très vieux concitoyens gênaient la construction, on ne pouvait, pour autant, les loger n'importe comment. Alors on leur a construit ces galeries, galeries qui sont par le fait un charnier et non un cloître. Lorsque, la ville continuant de grandir, on interdit les cimetières intra-muros, ces ossements anonymes et beaucoup d'autres trouvèrent une nouvelle adresse dans les anciennes carrières souterraines de Denfert-Rochereau, improprement nommées  Catacombes .

Allez, on entre ? Non, on regarde d'abord le portail, que je n'ai pas pensé à photographier (la honte !). Quoi de spécial ? Trois fois rien : il est d'époque mais il n'est pas d'origine… Pardon ? C'est bien un portail du XIIIe siècle mais il vient de l'île de la Cité ! de l'église Saint-Pierre-aux-Bœufs, rasée vers 1840 lorsqu'on a dégagé la vue autour de Notre-Dame. D'autres monuments parisiens ont ainsi déménagé au gré des remaniements du XIXe siècle, celui-ci est le premier, paraît-il.

Choeur de l'église Saint-Séverin, Paris V

Cette fois on entre.

La guerre de Cent Ans et un incendie n'avaient pas laissé grand-chose debout, seulement la tour et les deux premières travées de la nef. On a conservé ces restes et rebâti vers la fin du XVe siècle – confiant en l'avenir, on a rebâti moderne, en gothique flamboyant, et plus grand. Plus grand mais Dieu doit composer avec le cadastre : la façade ne pouvait pas bouger et, à l'autre bout, on tombe sur la rue Saint-Jacques – qu'il n'était pas question d'obstruer. Bloquée en longueur, l'église a donc crû en largeur : l'ancienne église comptait trois nefs, la nouvelle en aura cinq – et s'élargira encore un peu plus tard par l'ajout de chapelles latérales.

Ce qui fait que, si le vaisseau principal est d'une hauteur très honorable, les voûtes descendent ensuite jusqu'à la hauteur sous plafond d'un (très bel) appartement. En définitive, au lieu d'une haute et intimidante église en croix latine, qu'on croirait élevée d'un seul jet, on se trouve plutôt dans une grotte aussi large que profonde, sans transept, pleine de coins et recoins, de raccords, de retouches et de remplois, intime malgré sa taille et qui invite à l'exploration.

Explorons.

Ex voto, église Saint-Séverin, Paris V

Dans un journal local rien ne vaut les chiens écrasés pour humer la vie qui va. Dans une église catholique il faut chercher les ex-voto…

En pays de mer on remercie par un bateau miniature la Vierge d'avoir sauvé du naufrage les pères et les fils, en pays de mine on remercie par une lampe Sainte Barbe de les avoir sortis de la fosse où leurs camarades ont péri.

Ici, au Quartier Latin, les témoignages sont moins tragiques mais tout aussi fervents… il en est même de récents.

Ex voto, église Saint-Séverin, Paris V

On continuera dans un autre article, suffit pour aujourd'hui.

 Moins verbeux , qu'il disait.

Tssss…


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D
<br /> Très joli ! Vivement la suite...<br /> <br /> <br />
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M
<br /> Merci !<br /> On y travaille...<br /> <br /> <br />