J'aime bien Paris.
J'aime bien prendre des photos.
J'aime bien le mode panoramique
de mon appareil photo.
J'aime bien la lumière d'un crépuscule limpide tombant sur de vieilles pierres.
Alors, forcément…
Voici la pointe aval (occidentale) de l'île de la Cité, plus précisément le Quai des Orfèvres. Derrière cette rangée de maisons se trouve la place Dauphine, première place royale (autrement dit, ornée d'une statue du souverain régnant) de Paris, voulue par Henri IV.
En sus de l'invention de la poule au pot et de l'étude des vertus aphrodisiaques de l'ail, ce grand homme s'était soucié de moderniser une capitale qui n'en avait pas eu trop le loisir durant les Guerres de Religion. Il s'était donc attaqué à la mise en valeur de cette pointe ouest, jusque là jardin du Palais – le Palais, ancien palais royal puis Palais de Justice, se termine par la grosse bâtisse impersonnelle, à droite sur la photo.
Adonc il fit édifier la place Dauphine et achever le Pont-Neuf, premier pont de pierre et surtout premier pont sans maisons de Paris. Pour desservir le tout depuis la rive gauche, encore peu construite dans ces parages, il fit tracer la rue Dauphine, ainsi nommée en l'honneur de son fiston, futur Louis XIII.
À l'est de la ville, dans le Marais alors quartier neuf, la place des Vosges, élevée dans le même style, venait rétablir l'équilibre. Enfin, un peu plus au nord de ce même Marais, un nouveau quartier devait rassembler toute l'administration du royaume autour de la place de France, en demi-cercle aux limites de la ville. Ravaillac venu interrompre ces projets, il ne reste de la place que des noms de rues en étoile : rue de Bretagne, rue de Poitou, rue de Normandie… qui auraient dû mener à cette place dont la rue Debelleyme trace à peu près la limite – on a perdu quelque chose de gigantesque, regardez un plan pour vous en convaincre.
Quant à la place Dauphine… elle a beaucoup plus souffert de la négligence et de la cupidité que la place des Vosges. Vous voyez, tout à gauche, à l'entrée de la place, les deux beaux immeubles de brique et de pierre qui ressemblent, justement, à la place des Vosges ? Toute la place Dauphine était dans ce style et ces proportions. Maintenant, cherchez-en les traces dans la rangée de maisons, sous les crépis et les étages supplémentaires – la palme du sans-gêne revenant sans discussion au bunker de six étages qui termine l'enfilade. Ce devait être une belle place.
Il reste les crépuscules de printemps pour nous faire rêver devant cette longue vague de pierre.